Scénarios pour la Syrie - 3.4. Retour à une Syrie d'Al-Assad ?

Syrie, camp de réfugiés, réfugié syrien

Malgré la récente victoire à Qusayr des groupes pro Al-Assad, et malgré le caractère stratégique de la ville, ce scénario semble peu probable, mais pas impossible, dans un avenir très proche.

Pour obtenir une victoire totale, on peut supposer que le régime de Bachar Al-Assad poursuivrait et même renforcerait sa stratégie actuelle de déplacement des populations et de recours aux forces étrangères. Or, cette stratégie a des impacts profonds qui rendraient la construction de la paix beaucoup plus difficile : elle favorise le sectarisme, la spirale de la peur, de la haine et de la vengeance, tout en détruisant les richesses et en rendant ainsi plus difficile la prise en charge des personnes déplacées et leur retour à une vie normale.

Comme souligné il y a presque un an par Joshua Landis :

"La communauté alaouite au sens large craint la possibilité d'un châtiment sans but. Pour éviter cela, il est probable qu'Assad poursuive l'option libanaise : transformer la Syrie en un marécage et créer le chaos à partir des sectes et des factions syriennes. C'est une stratégie qui consiste à jouer sur les divisions pour semer le chaos." (Création d'un marécage syrien : Le "plan B" d'Assad", pour Syria Comment, 10 août 2012)

Joseph Holliday excellent rapport, Le régime Assad : de la contre-insurrection à la guerre civile (mars 2013 pour l'ISW, notamment pp.19-23), permet de rendre compte de la stratégie du régime en matière de déplacement des populations, visant à séparer " la rébellion " d'une base potentielle. Selon lui, à partir des mois qui ont suivi le bombardement de Homs en février 2012, elle a été de plus en plus poursuivie intentionnellement (p.19, également "Le conflit mutant de la Syrie," International Crisis Group, août 2012 : 6-7). Avant cela, elle aurait également été faite " au moins dans les régions côtières à majorité alaouite ", où " des opérations de nettoyage répétées dans les enclaves sunnites côtières ont eu lieu " (p.19). Elle se fait de cinq façons :

  • Utilisation de bombardements d'artillerie sur les villes et les quartiers, ou "politique de la terre brûlée" (Holliday : pp.19-20, ICG : 6-9)
  • Campagne de bulldozage de quartiers à Damas et aussi à Hama avec l'aide de troupes paramilitaires pour expulser les gens (automne 2012 - pp.21-22).
  • Massacres d'hommes, de femmes et d'enfants dans les villages et quartiers sunnites de Syrie par les milices pro-régime, notamment dans les zones proches des villages et quartiers alaouites (pp.21-22). Holliday souligne toutefois que "Bien que les milices pro-régime soient les principales responsables de ces meurtres, il est difficile d'exonérer le régime de toute responsabilité dans la plupart des cas." (p.21)
  • La puissance aérienne, notamment l'utilisation d'hélicoptères et de bombes dites "barils" (bombes improvisées fabriquées à partir de barils de pétrole et larguées par des hélicoptères syriens, dispositif incendiaire visant à mieux détruire les bâtiments), le ciblage des boulangeries pp.22-25).
  • Utilisation de missiles balistiques sol/surface (SSBM) contre la population à partir de janvier 2013 (pp.24-25).

En conséquence, le nombre de réfugiés et de personnes déplacées augmente de façon exponentielle. En avril, selon l'AFP, plus de 60.000 étaient morts (jusqu'en novembre 2012), tandis que 1,2 million avaient fui vers les pays voisins et 4 millions étaient déplacés à l'intérieur du pays. Le 13 juin 2013, l'ONU estime qu'au moins 93.000 personnes sont mortes à ce jour au cours du conflit (BBC News, 13 juin). Au 17 juin, 1,64 million de personnes sont réfugiées dans d'autres pays, selon Estimations en cours du HCR et la Syrie compte 4,25 millions de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays (PDI), d'après les données de la Commission européenne. USAID et le Centre de surveillance des déplacements internes.

Syrie, personnes déplacées à l'intérieur du pays

Toutes choses étant égales par ailleurs, pour tout étudiant du Cambodge, la situation donne un sentiment étrange de... déjà vu en termes de réfugiés (pendant la guerre de 1970-1975, sous le régime du Kampuchea démocratique - les Khmers rouges - et après), de vidage des villes et des villages (par le Parti communiste du Kampuchea (CPK) - les "Khmers rouges" - une fois la victoire acquise) et de violence contre sa propre population. Ce n'est pas un hasard si Holliday utilise dans son rapport le terme de "purification". Espérons que pour la Syrie et pour les Syriens, la comparaison s'arrête là. Néanmoins, compte tenu de la très forte tension dans le pays, non seulement depuis le début de la guerre civile, mais aussi auparavant, puisque la Syrie a été sous état d'urgence entre 1963 et avril 2011, la destruction même du tissu social induite par la manière dont la guerre civile est menée, comme le note Lyse Doucet dans son "Qusair - la ville syrienne qui est morte" (BBC News, 7 juin 2013), il est difficile d'imaginer comment un régime Al-Assad victorieux pourrait gouverner autrement que par la peur et encore une fois l'urgence, de rester positif et de ne pas tirer de conclusions hâtives.

L'aide et le soutien des alliés du régime victorieux seraient alors cruciaux pour éviter de voir s'installer la paranoïa, la violence et les représailles.

Bien que sa mise en œuvre soit diplomatiquement complexe, voire impossible, la Syrie devrait être ramenée dans la famille des nations le plus rapidement possible pour les mêmes raisons. Toute pression devrait être exercée avec la plus grande prudence tout en pensant aussi et toujours à l'impact sur les populations civiles. Ne pas le faire pourrait avoir des conséquences très néfastes pour la population. Cela pourrait également avoir le potentiel de créer un noyau d'Etats (Iran, Irak, Syrie) avec lesquels les relations, pour de nombreux autres pays, seraient tendues. La Russie et la Chine auraient alors le pouvoir de jouer le rôle de contrepoids.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 3.4.

si l'on considère les forces en présence sur le terrain (billet à venir), ce scénario est le moins improbable des quatre derniers que nous avons esquissés. Cependant, les chances de voir une victoire réelle et complète, suivie d'une paix, restent minces.

Quelques indicateurs qui pourraient être suivis comme influençant la probabilité de ce scénario :

  • le type de soutien accordé aux différents groupes d'insurgés ;
  • la capacité des groupes d'insurgés à s'unir et à être efficaces ;
  • la manière dont les groupes d'insurgés vont combattre et mobiliser la population, notamment en réussissant ou non à la protéger contre les déplacements de population du régime Al-Assad ;
  • le soutien et le niveau de protection que les groupes d'insurgés et les populations civiles pourraient obtenir avec certitude après la victoire ;
  • le niveau de menace, tant externe qu'interne, ressenti par la puissance victorieuse ;
  • le type de soutien apporté au nouveau régime syrien ;
  • la capacité à réintégrer la nouvelle Syrie dans la société internationale des États ;
  • la manière dont les réfugiés et les PDI sont réintégrés (et le soutien négocié, c'est-à-dire accordé et accepté) ;
  • le pouvoir et la sagesse des différents réseaux commerciaux en faveur du commerce durable et équitable ;
  • l'intérêt et le jeu des différents réseaux de criminalité organisée dans la situation en Syrie.

Ce scénario met fin à notre série de scénarios pour la Syrie dans un avenir à court et moyen terme.

Image d'en-tête : Bachar el-Assad visitant la tombe du Soldat inconnu par Syrianist (œuvre propre) [CC-BY-SA-3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0)], via Wikimedia Commons

The Red (team) Analysis Weekly n°104, 13 juin 2013

Au milieu de la tourmente - Une fois que l'on a dépassé le tsunami d'articles concernant la NSA, on continue de voir apparaître le même schéma de changements profonds et douloureux que celui observé ces derniers mois. Les pays de la zone euro ne sont pas seulement en crise, mais, très probablement, vivent un changement profond. Pour l'instant, la Grèce est le premier pays à supporter le poids des changements, mais le Royaume-Uni, l'Italie, l'Irlande ou la France, cette semaine, ne sont pas épargnés. On peut aussi se demander si les événements en Turquie, après le printemps arabe, le mouvement Real Democracy Now en Europe, notamment en Espagne, et le mouvement Occupy ne sont pas un symptôme supplémentaire des efforts de plus en plus nombreux et généralisés des sociétés pour trouver leur voie dans un monde qui a changé, qui change et qui n'est pas encore stabilisé.
Pendant ce temps, sur le plan géostratégique, le Moyen-Orient est définitivement en pleine tourmente, tandis que l'Asie est confrontée à ses propres changements et défis, l'Inde étant à nouveau sous les feux de la rampe cette semaine.

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sécurité nationale, renseignement anticipé, risque politique

Scénarios pour la Syrie - 3.3.2. Une Syrie véritablement séculaire ?

Ce billet se propose d'esquisser l'avant-dernier scénario pour la Syrie à court et moyen terme, à savoir "une Syrie séculaire" résultant d'une véritable victoire de l'un des groupes belligérants. Dans l'état actuel des choses, ce scénario est peu probable, voire utopique. Pourtant, en l'imaginant, on peut suggérer des politiques et des stratégies qui pourraient changer la donne.

Les différents scénarios construits au cours des dernières semaines sont résumés dans le graphique ci-dessous. Cette "cartographie" commence à explorer les moyens de considérer des ensembles de scénarios comme un tout systémique et dynamique. L'épaisseur de la flèche indique une probabilité plus élevée et un délai plus court : plus une flèche est épaisse, plus il est probable et plus rapide qu'un scénario évolue dans une direction spécifique ; à l'inverse, une ligne pointillée indique une probabilité plus faible et/ou un délai plus long. La probabilité et la durée évolueront en fonction des événements.

Syrie, guerre civile syrienne, scénarios, intelligence anticipée

Scénario 3.3.2 : Une Syrie séculaire ?

Voir une Syrie laïque renaître des cendres de la guerre présupposerait une victoire du Conseil suprême de commandement militaire conjoint (SJMCC ou SMC), remportée notamment par des combattants affiliés à des groupes modérés ou laïques, tandis que l'ascendant des Frères musulmans au sein de l'organe politique correspondant, la Coalition nationale des forces révolutionnaires et d'opposition syriennes (NC) s'est affaibli.

A ce jour, il est donc encore plus improbable que le scénario précédent. Tout d'abord, l'absence de coordination et d'une structure de commandement et de contrôle efficace, telle qu'analysée par Ignace (7 juin 2013, Le Washington Post) dans la récente perte de Qusair au profit des groupes pro Al-Assad est un sérieux obstacle. Deuxièmement, la faiblesse estimée du nombre de combattants de la FSA (si l'on ne tient pas compte des groupes islamistes et des groupes soutenus par les Frères musulmans) limite sérieusement les possibilités de victoire (Ignatius, 3 avril 2013 et Lund, 4 avril 2013). Enfin, les laïcs et les modérés au sein du CN n'ont guère de soutien extérieur, comme le montrent quotidiennement les hésitations américaines et européennes.

Néanmoins, imaginons que la dynamique change et que ce scénario utopique devienne une réalité, sous un nouveau type de leadership, réussissant à unifier et à mobiliser la rébellion de manière non sectaire. En s'appuyant sur la série de trois billets de Matthew Barber (27 mai 2013 pour Syrian Comment) se concentrant sur le cheikh soufi Muhammad al-Yaqoubi et sur la façon dont les espoirs de le voir officiellement élu à la Coalition nationale ont été déçus à la fin du mois de mai 2013, ce leadership pourrait être soufi. En effet, souligne Barber :

"Un courant soufi émergent au sein de la résistance syrienne pourrait bientôt offrir une alternative à l'hégémonie des Frères musulmans et changer la dynamique de l'opposition politique." (Barber, 22 mai 2013Commentaire sur la Syrie)

Les pays, tels que les États-Unis, le Royaume-Uni ou la France, qui cherchent un moyen de soutenir une solution qui mettrait fin au conflit syrien, éviterait une effusion de sang sectaire et la perspective d'une balkanisation de la Syrie, respecterait la démocratie et les droits fondamentaux, sans favoriser l'extrémisme et les tensions supplémentaires, voire la guerre dans la région, auraient perçu le soutien à un tel courant comme une réponse. En pratique, et selon une enquête plus approfondie, les acteurs intéressés auraient travaillé avec le "Mouvement pour la Construction de la Civilisation" ou le Tiyaar Binaa' al-Hadaraqui devrait être "opérant bientôt à partir d'un bureau en Jordanie" (Entretien avec le cheikh al-Ya'qoubi, Barber, 30 mai 2013). Comme l'explique Barber,

"Le cheikh al-Ya'qoubi et d'autres dirigeants soufis ont gagné en influence ces derniers temps, en travaillant ensemble depuis environ six mois pour former une organisation faîtière pour les groupes rebelles, composée de sunnites et de soufis alignés sur les valeurs dominantes de la Syrie, plutôt que sur les programmes islamistes. Cette organisation s'appelle le Mouvement pour la construction de la civilisation. Lui et ses pairs ont produit un document de charte que les groupes rebelles peuvent signer." (Barber, 22 mai 2013Commentaire sur la Syrie)

Partant des 200 groupes avec lesquels les Cheikhs soufis (ibid.), renforcés par les soutiens inédits reçus, d'autres groupes se joindraient sous un SMC fortifiant, qui serait de plus en plus victorieux, malgré des batailles acharnées. Pendant ce temps, la montée en puissance des modérés au sein du CN s'accentue. D'après Barber (Ibid., voir aussi la section série sur les influences salafistes et soufies de l'islam en Syrie in Syria Comment, 2007), les oulémas soufis bénéficient d'un soutien considérable au sein de la population musulmane sunnite en Syrie. Selon le cheikh al-Ya'qoubi, " probablement un quart de la population syrienne est soufie " (entretien), ce qui représenterait 5,6 millions de personnes (sur les estimations de la Banque mondiale pour 2012). Des personnalités aussi respectées que

"Le cheikh al-Ya'qoubi représente le type d'islam modéré et traditionnel que la plupart des Syriens connaissent, l'islam contesté par les Frères musulmans et les salafistes. Bien qu'il prenne une position sans ambiguïté contre la violence, l'injustice et la terreur du régime, il [le cheikh al-Ya'qoubi] continue également d'exercer son influence en encourageant les rebelles à éviter le terrorisme par les moyens suivants fatwas Il condamne des tactiques telles que les attentats à la voiture piégée, les enlèvements, les mines terrestres, le meurtre de prisonniers et la violence contre les non-combattants politiquement alignés sur le régime... Il maintient une position très claire en défendant les droits de toutes les minorités, y compris celles qui sont condamnées par les extrémistes comme étant hétérodoxes... Il pense que les lois actuelles de la Syrie sur la famille sont très bien, et qu'elles sont déjà suffisamment compatibles avec les principes de l'Union européenne. shari'a. Il estime également que la réforme juridique ne devrait pas être poursuivie avant la formation d'un comité fondé sur la constitution qui s'attaquerait aux changements nécessaires, après le régime est tombé et un nouveau gouvernement syrien a été créé". (Barber, 22 mai 2013Commentaire sur la Syrie)

En conséquence, une forte mobilisation de la population sunnite, à partir du noyau soufi, se produirait. Les craintes sectaires diminuant en général, les capacités de mobilisation d'autres groupes (y compris ceux permettant la création de l'" Armée du peuple " du régime de Bachar el-Assad ou de l Jaysh al-Sha'bi (voir l'excellent rapport de Joseph Holliday, Le régime Assad : de la contre-insurrection à la guerre civile - mars 2013 pour le SIE) disparaîtraient progressivement.Petit à petit, les groupes et les personnes non sunnites commenceraient à croire et à soutenir activement la nouvelle vision d'une Syrie laïque et modérée. Considérant l'influence du soufisme parmi les Kurdes en Syrie (Paulo Pinto, Syrian Studies Association Bulletin, Vol 16, No 1, 2011), un terrain d'entente réaffirmé serait trouvé et les Kurdes rejoindraient pleinement les nouvelles forces.

De plus, la construction de liens historiques antérieurs comme l'explique Weismann (extrait rapporté par Joshua Landis, 11 mai 2007), la nouvelle vision soufie pourrait trouver un terrain d'entente avec les salafis syriens et les Frères musulmans syriens, et ainsi les intégrer.

Par conséquent, la victoire signifierait véritablement une Syrie où toutes les personnes et tous les groupes sont intégrés, à l'exception des seigneurs de la guerre et des acteurs les plus violents qui devraient encore être ramenés dans la société. La Syrie pourrait constituer un nouveau modèle de politique laïque, mais spirituelle, et à prédominance musulmane. En tant que telle, elle pourrait également être perçue comme une menace par d'autres acteurs dans d'autres pays, qui pourraient également sentir leur propre pouvoir, issu d'autres modèles, remis en question. La nouvelle Syrie laïque devra faire attention à ces dangers, sans toutefois tomber dans le piège de la paranoïa.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 3.3.2.

À l'heure actuelle, si les conditions ne changent pas, et comme souligné précédemment, ce scénario est assez improbable. Cependant, en supposant que le Mouvement pour la construction de la civilisation (ou une initiative similaire) réussisse à voir le jour, il a alors le potentiel de changer lentement et progressivement les probabilités de très improbable à plausible et même probable. Le plus important, le bon timing pour chaque action devra être respecté, comme l'a souligné à plusieurs reprises le Cheikh al-Ya'qoubi.

Quelques indicateurs qui pourraient être suivis comme influençant la probabilité de ce scénario :

  • Création du Mouvement pour la construction de la civilisation (ou une initiative similaire) avec des liens réels en Syrie ;
  • Mobilisation de la population syrienne, à travers les groupes et les communautés ;
  • Compétences stratégiques, opérationnelles et tactiques du SMC dans cette nouvelle configuration et des groupes de combat affiliés au Mouvement.
  • Propagande et tromperie visant à alimenter les peurs et la haine (externes et internes).
  • Un soutien matériel adéquat de la part des différents acteurs ;
  • Des discussions et une coopération appropriées entre les partisans et les forces modérées menant à des actions communes, le cas échéant ;
  • Patience des soutiens extérieurs ;
  • Actions contre les partisans d'une Syrie laïque par des acteurs (externes et internes) qui parrainent d'autres solutions pour la Syrie ;
  • Régionalisation de la guerre ;
  • Changements de situation pour l'un des acteurs extérieurs (par exemple, quelles implications peuvent avoir les événements en Turquie sur la situation - actuelle et future - en Syrie ?)
  • Changements dans la situation mondiale et régionale.

Scénario 3.4. : Une Syrie d'Al-Assad ?... A suivre.

Image en vedette : Syria, palmera By Anas Al Rifai (Own work) [CC-BY-SA-3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0)], via Wikimedia Commons.

Scénarios pour la Syrie 3. Une Syrie islamiste nationaliste ou une Syrie des Frères musulmans ?

Cet article poursuit l'exploration de divers scénarios autour du thème "une véritable victoire en Syrie" par l'un ou l'autre des groupes qui se battent sur le terrain, en commençant par une Syrie islamiste nationaliste, puis en passant à une Syrie sous la direction des Frères musulmans. Pour chaque scénario, les estimations actuelles de la probabilité seront exposées et certains indicateurs influençant la probabilité seront suggérés.

Scénario 3.2 : Une Syrie islamique nationaliste ?

Syrian_Islamic_Front_Logo

Si les groupes victorieux sont des factions islamistes sunnites et salafi-nationalistes, alors ils mettraient en place un État islamique en Syrie. Selon Lund, et en supposant que ces groupes suivent la charte officielle du SIF de janvier 2013, ils "établiront à tout prix un État guidé par la charia, tout en faisant des gestes de modération et de tolérance envers les groupes minoritaires" (p.16) ou, selon leurs propres termes, ils "... construiront une société islamique civilisée en Syrie, régie par la loi de Dieu" (p.19).

Logo du Front de libération syrienne

Ils seraient opposés "à la laïcité et à la démocratie" (p.17) parce que "la charia islamique ne peut pas être soumise à un vote" (p.20) ; cependant, "les élections pourraient toujours être utilisées comme système pour désigner des représentants et des dirigeants..." tant que les modalités et les parties potentielles sont liées à la charia.

Plutôt que d'adopter une position de confrontation, ils seraient "désireux de parvenir à un accord". modus vivendi avec l'Occident", comme en témoigne leur volonté "d'ouvrir des canaux de communication" pendant la guerre. (p.18)

Sur le chemin de la victoire, comme ils auraient accordé autant d'attention à la guerre qu'à l'édification des véritables fondements d'une société islamique ("le mouvement civil, d'où jaillissent les mouvements missionnaires, éducatifs, humanitaires, médiatiques, politiques et de [service public]" (19), une fois au pouvoir, leur tâche de stabilisation de la paix serait facilitée. Ils chercheront à maintenir, à étendre et à approfondir les structures et les processus déjà existants. Ils se concentreraient sur la Syrie et ses besoins.

Réussir pleinement à construire ce type de paix en Syrie serait très probablement le plus dur et le plus difficile en ce qui concerne les groupes islamistes non sunnites. Comment des croyances et des modes de vie très différents pourraient-ils être pris en compte par un État respectant la charia ? Pourraient-ils être intégrés avec succès et comment ? Ou cela conduirait-il à une reprise de la guerre civile, à de multiples exodes et, dans le cas des Kurdes, à un Kurdistan semi-autonome ou totalement indépendant ?

En supposant que la meilleure façon d'intégrer ces communautés ne soit pas trouvée, cela conduirait-il à nouveau à une implication étrangère et, par conséquent, à des possibilités accrues de guerre ?

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 3.2.

L'agenda plus pragmatique et plus centré sur la Syrie de ces groupes, ainsi que le nombre de combattants (entre 47000 et 67000 combattants selon les estimations (Lund, Ignatius, voir détail ici) pour le SIF et le SLF/SILF sont ajoutés), et leur structure, impliquent que ce scénario est moins improbable que le précédent. Cependant, compte tenu de la force militaire des groupes pro-Assad, ainsi que de la régionalisation croissante de la guerre civile, il est encore loin d'être probable.

Quelques indicateurs qui pourraient être suivis comme influençant la probabilité de ce scénario :

  • La désunion et les luttes intestines qui se poursuivent au sein de l'opposition "modérée" (NC) ont un impact sur la capacité à obtenir un soutien à l'extérieur et à l'intérieur et ont des conséquences sur les opérations militaires.
  • Le succès ou l'échec de l'ouverture de canaux de communication avec l'Occident - et plus largement au niveau international - par ces groupes sur le mode de ce qui est fait par le FIS, et dans la capacité à convaincre de leur approche pragmatique et centrée sur la Syrie.
  • Capacité de ces groupes à s'efforcer et à réussir à fournir à la population syrienne des "services publics", conformément à l'idéologie des groupes et sans susciter de réaction négative.
  • Régionalisation croissante du conflit et volonté internationale d'y mettre un terme.
  • Modification de la configuration générale du support externe.

Scénario 3.3. : Une Syrie séculaire ?

Ce scénario (ou plutôt une variation autour de ce thème) serait censé se produire si le groupe vainqueur est la Coalition nationale des forces révolutionnaires et d'opposition syriennes (NC) et son bras armé correspondant, le Conseil suprême de commandement militaire interarmées (SJMCC ou SMC).

Cela supposerait d'abord que les différents groupes affiliés au SMC parviennent à unir leurs forces pour combattre, tandis que le CN trouverait un moyen largement accepté d'élire des représentants et de fonctionner. Notamment, cela impliquerait que les luttes intestines, telles qu'elles ont par exemple été affichées au cours de la dernière semaine de mai 2013 (ex : Barbier pour la Syrie Commentaires, 27 mai 2013), entre les groupes plus laïques et modérés, d'une part, et les Frères musulmans, d'autre part, ainsi que leurs soutiens, cessent, et que les alliances conclues avec les différentes factions tiennent et sont honorées. Le CN et le SMC devront également trouver un moyen de gérer le "bon" soutien de leurs alliés, c'est-à-dire suffisamment et de la bonne manière pour disposer d'une puissance de feu suffisante pour combattre avec succès et pour livrer la population qu'ils cherchent à mobiliser et qui est sous leur autorité, sans pour autant créer une réaction négative parmi les nationalistes qui pourraient les accuser de vendre la Syrie à des intérêts étrangers.

Compte tenu des différences existant entre la Fraternité Musulmane et d'autres groupes, nous pouvons imaginer deux sous-scénarios possibles.

Scénario 3.3.1. Une Syrie des Frères musulmans

Syrie, guerre civile, scénarios syriens

En supposant qu'un CN à forte tendance Frères musulmans l'emporte, et qu'il ait obtenu suffisamment de pouvoir sur les forces combattantes du SMC, nous aurions un système qui "soutient les élections démocratiques et de nombreuses libertés politiques tout en épousant la vision d'un État syrien qui met en œuvre des cadres de référence islamiques sunnites pour sa législation." (O'Bagy, Jihad en Syrie, Sept 2012 :17).

En effet, comme le note Aymenn Jawad Al-Tamimi, "la conception des Frères musulmans de l'application de la loi islamique [est] une action graduelle... étape par étape, afin de faciliter la compréhension, l'étude, l'acceptation et la soumission" (pour Syria Comment, 20 mars 2013). Si nous nous tournons vers le texte utilisé comme référence par Al-Tamimi, nous trouvons non seulement une description de cette action graduelle nécessaire, mais aussi une référence au but ultime, la restauration du califat (cf. poste précédent pour en savoir plus sur le califat).

 "Nous ne devons pas imposer l'islam la shari'a, forcer les gens à adopter quelque chose qu'ils ignorent et avec lequel ils ne sont pas familiers... Si nous faisons cela, [divers] stratagèmes seront utilisés pour le contourner, et il y aura de l'hypocrisie. [Les gens] ne feront preuve d'un [comportement] islamique qu'en apparence...

" Noé, que la paix soit avec lui, reçut un signe clair, une vision crue, une prophétie et une miséricorde que son peuple ne comprit pas... Noé ne pouvait pas forcer ou imposer [sa foi au peuple]. Il a déterminé le principe du choix de la foi [à la suite] de la persuasion et de la réflexion, [au lieu] de l'oppression, de l'autorité, de la condescendance et de la coercition. ...

"Il n'y a pas d'autre voie que l'action graduelle, en préparant les âmes [des gens] et en donnant l'exemple, afin que la foi entre dans leurs cœurs... L'action graduelle n'impose pas l'islam d'un coup, mais plutôt étape par étape, afin de faciliter la compréhension, l'étude, l'acceptation et la soumission".

" Le Prophète, paix sur lui, a agi de manière graduelle, en préparant d'abord le peuple, puis [en préparant] la famille, la société, l'État, et enfin le califat... ".

" Je demande à l'honorable Al-Azhar de rallier les courants islamiques afin d'unir la parole et l'effort des musulmans, de restaurer le califat et de préparer un plan pratique pour appliquer la loi d'Allah l'Exalté. " (Article sur Site web des Frères musulmans: Implement Shari'a in Phases, 11 juin 2011 ; MEMRI, 5 juillet 2011, Special Dispatch No.3969)

Ce scénario peut donc être considéré comme un mélange du scénario 3.2. en termes de rythme et d'approche pragmatique, étant même prêt à des changements plus lents, avec, au début, une vision moins stricte de ce qui peut être fait ou non, et du scénario 3.1. en termes d'objectif final, mais sur un calendrier beaucoup plus long, et certainement avec des moyens différents.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 3.3.1.

Ce scénario, jusqu'à présent, semble assez peu probable compte tenu de la faiblesse et de la désunion du CN et du CSM. De plus, l'histoire même des Frères musulmans en Syrie, impliquant, comme l'explique O'Bagy (Jihad in Syria, 2012 : 11-13), la méfiance de la population et la faiblesse de leur présence et de leur réseau en Syrie, le rendrait encore moins probable, malgré la force des Frères musulmans au sein du CN aujourd'hui.

Quelques indicateurs qui pourraient être suivis comme influençant la probabilité de ce scénario

  • Un soutien extérieur fort (jusqu'à l'intervention extérieure) compensant l'absence de légitimité, de réseau de soutien et de présence sur le terrain et permettant d'en créer un.
  • Capacité d'unir les factions sous la direction de la Fraternité ;
  • Absence ou disparition d'une meilleure alternative pour les différents acteurs, notamment la population.
  • Succès de la campagne "des cœurs et des esprits" en Syrie pour gagner la population et construire la légitimité.

Scénario 3.3.2.

A suivre

Image en vedette : Page Facebook de l'Armée de l'Islam

The Red (team) Analysis Weekly n°102, 30 mai 2013

Un changement cognitif ? Il est intéressant de noter que, par rapport à il y a quelques mois seulement, les signaux sont de plus en plus liés à la géo-stratégie, à la guerre, à la géopolitique. Les autres questions restent cruciales et n'ont pas disparu, mais nous pouvons commencer à voir le système mondial global changer, en termes de prééminence donnée aux types de défis également.

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analyse d'horizon, sécurité nationale, risque politique, renseignement anticipé, alerte, signal

Scénario pour la Syrie - 3.1 : Une vraie victoire - un Al-Sham islamique ?

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Compte tenu de l'état actuel des choses, le scénario 3 : une véritable victoire en Syrie, et ses sous-scénarios sont plutôt improbables à court terme. Cependant, ils méritent d'être soulignés car ils apportent un éclairage analytique sur les dynamiques et les stratégies potentielles pour favoriser ou contrer l'une ou l'autre possibilité, en fonction des intérêts, et parce qu'ils pourraient être pertinents à moyen terme. Le chaos et le début du "warlordisme" qui caractérisent la situation syrienne, comme le soulignent les analystes (par exemple Joshua Landis, 1er mai 2013Commentaire sur la Syrie ; Aymenn Jawad Al-Tamimi, 14 mai 2013, Jihadologie ; voir aussi premier message de la série sur la Syrie) conduisent à la probabilité relativement faible de voir l'un de ces scénarios (ou plutôt des variations de ceux-ci) se réaliser. Néanmoins, en ce qui concerne scénario 1 : La paix à Genève  et scénario 2 : Pas de Syrien à Genèveet, outre les signaux indiquant une amélioration du désordre ambiant, nous tenterons d'esquisser des indicateurs qui pourraient faire l'objet d'un suivi plus spécifique pour évaluer la probabilité et le calendrier.

Scénario 3 : une vraie victoire en Syrie ?

Une fois que la victoire de l'un des belligérants sur tous les autres se produit, le vainqueur se retrouve en position de force au niveau national et peut commencer à reconstruire une véritable paix.

guerre, scénario, soutien de la population

Les premières années seront encore difficiles et le nouveau gouvernement devra développer de nouveaux moyens pour stabiliser la situation, en s'assurant que les vaincus ne retrouvent pas le chemin de la violence et de la guerre. L'administration de l'État devra être reconstruite là où elle a été détruite afin que la mission des autorités politiques puisse être menée à bien. Pourtant, nous sommes dans une configuration politique beaucoup plus facile que celle du scénario 1. En effet, la guerre ne peut pas vraiment être gagnée sur un territoire donné sans des troupes de combat qui sont suffisamment unis pour permettre une stratégie, des opérations et des tactiques appropriées, et sans une population mobilisée et/ou contrôlée (le "soutien" donné par la population peut être obtenu avec plus ou moins de coercition, mais doit être présent - voir notamment la littérature sur  contre-insurrectionainsi que les théories - et la pratique - de l'agriculture biologique. La guerre du peuple). Ainsi, remporter la victoire signifie que le vainqueur a également réussi à avoir un monopole efficace des moyens de violence (les troupes combattantes victorieuses et l'appareil coercitif au sein de la population, allant de doux à violent), ainsi qu'un moyen d'extraire le surplus de la population en échange de services (y compris la conduite de la guerre).

Par conséquent, gagner la guerre implique que les processus fondamentaux qui sous-tendent le fonctionnement des autorités politiques ont été mis en œuvre et maîtrisés. Le passage de la guerre et de l'urgence à la paix doit encore être réalisé, tandis que les nouvelles autorités politiques doivent consolider leur légitimité, et ce sont là des défis cruciaux, d'où les premières années difficiles, mais les bases pour réussir sont là.

La manière dont la stabilisation de la guerre à la paix se ferait, avec quel type d'autorités politiques et sous quel type de régime, varierait en fonction du belligérant victorieux. L'impact international changerait en conséquence, avec, à son tour, des conséquences sur la situation intérieure syrienne et le type de paix que le vainqueur réussirait à mettre en œuvre.

Scénario 3.1. : Un al-Sham islamique ?

Si les groupes victorieux étaient Salafi-Jihadiils créeraient une théocratie, un état strict de charia. Si l'on se réfère à La déclaration d'avril de Jabhat al-Nusra (Barber, 14 avril 2013, Syria Comment), alors ils chercheraient à créer des l'État islamique d'Al-Shamc'est-à-dire une entité politique couvrant le Levant. Si l'on se réfère à Abu Bakr al-Baghdadi, le chef d'Al-Qaida en Irak, leur objectif serait alors de créer le État islamique d'Irak et d'Al-Sham (ISIS) (Ibid). Comme l'explique Aymenn Jawad Al-Tamimi (14 mai 2013) et par Lund (22 mai 2013(Commentaire sur la Syrie), qui passe également en revue d'autres analyses connexes, nous sommes actuellement dans un épais brouillard de guerre quant à ce qui se passe au sein des factions d'Al-Qaida en Syrie : nous ne savons pas exactement s'il y a des dissensions entre les différents groupes, quelle est leur importance et quel camp, le cas échéant, l'emportera.

Califat, Jihad, Syrie, Al-Sham, Scénario

Quelle que soit la réalité qui émergera, et pour les besoins de ce scénario, en supposant donc que les groupes victorieux soient salafi-jihadi, l'actuelle Syrie territoriale (avec ou sans le Kurdistan syrien, selon la manière dont la guerre serait menée sur cette partie du territoire et gagnée ou perdue là) serait très probablement considérée comme le cœur à partir duquel la guerre pour conquérir le reste du Levant (avec ou sans l'Irak selon le cas) pourrait être menée. Le nouvel Al Sham serait donc expansionniste et porteur de l'objectif salafi-jihadiste qui "cherche à établir un califat islamique qui engloberait l'ensemble de l'Umma, ou communauté musulmane" (O'Bagy, septembre 2012:17) par tous les moyens, de la guerre ouverte au soutien des réseaux terroristes et au jihad individuel à l'étranger.

Le califat ou Khilafa est expliqué et défini par des termes différents selon les auteurs, mais des similitudes subsistent, notamment l'expansion :

"L'exposé le plus célèbre de la théorie islamique de l'État est celui de l'érudit al-Mawardi, qui affirmait que l'établissement du califat était une obligation islamique acceptée par les érudits. Son traité al-Ahkam al-Sultaniyya (les règles de gouvernance) reste l'une des principales références classiques de la théorie politique islamique. Il y explique que le dirigeant est soit élu par les représentants du peuple, soit nommé par le calife précédent. Les responsabilités du calife comprennent l'application du hudood (châtiments explicitement proscrits par l'islam pour des actes tels que le vol, la rébellion, les actes publics de relations extraconjugales), la collecte et la distribution des impôts conformément aux prescriptions de la charia, ainsi que la protection et l'extension des frontières de l'État islamique." Le Dr Reza Pankhurst, politologue et historien, spécialiste du Moyen-Orient et des mouvements islamiques, "Comprendre les appels au califat," 22 août 2011, Foreign Policy Journal.

"Le khilafa (califat) pour les islamistes est l'idée qu'ils ont le devoir d'établir des "États islamiques" - décrits par des platitudes vagues, théoriques et idéalistes - qui seraient ensuite unis dans un État panislamique mondial ou "nouveau califat"." Dr Usama Hasan, chercheur à la fondation Quilliam, pour BBC News, 24 mai 2013

"Tant sur le plan historique que sur le plan doctrinal, la fonction du califat est de mener le djihad, chaque fois que cela est possible, pour soumettre le monde infidèle à la domination islamique et faire appliquer la charia. En fait, la majeure partie de ce que l'on appelle aujourd'hui le "monde musulman" - du Maroc au Pakistan - a été conquise, petit à petit, par un califat qui a débuté en Arabie en 632.
Un califat qui mène le jihad et applique la charia représente un ennemi permanent et existentialiste, et non un ennemi temporel qui peut être acheté ou apaisé par la diplomatie ou des concessions. Un tel califat est précisément ce que les islamistes du monde entier cherchent fébrilement à établir." Raymond Ibrahim, directeur associé du Middle East Forum, 8 mars 2011, Gatestone Institute.

Malgré la nécessité de l'expansion, les actions agressives peuvent aussi être retardées, ou ralenties, pour permettre d'abord une consolidation au niveau national.

Toutefois, si la rivalité entre les groupes salafistes-djihadistes devait réapparaître après une victoire sur le territoire syrien, les chances de consolider la paix à l'intérieur du pays seraient réduites en raison des luttes intestines, suivant, pour l'essentiel, celles qui se déroulent actuellement. Dans le même temps, le potentiel d'actions djihadistes agressives serait renforcé, car tous les groupes voudraient affirmer leurs références djihadistes et les utiliser pour motiver idéologiquement les combattants, tout en s'aliénant probablement une partie de la population, ce qui contribuerait à nouveau à réduire les chances de stabiliser pleinement la situation au niveau national.

Les États directement menacés par un Al-Sham agressif - et d'autres entités régionales similaires - n'auraient d'autre choix que de riposter. Les perspectives d'une conflagration régionale et mondiale seraient accrues. La paix en Syrie aurait été de courte durée.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 3.1.

A ce jour, la probabilité de voir ce scénario se réaliser est résumée par Aymenn Jawad Al-Tamimi (14 mai 2013): "Au milieu d'un tel chaos, je considère qu'il est peu probable que JAN [Jabhat al-Nusra] progresse considérablement ou perde du terrain au-delà de ses bastions probables dans le nord et l'est. Bien que JAN puisse être régulièrement décrit comme la force de combat la plus efficace, il peut être trop facile de surestimer la taille et l'influence réelles du groupe. Pour résumer, je vois se développer un équilibre de désordre. "

Utilisation de Aymenn Jawad Al-Tamimi's ainsi que l'article de Lund (22 mai 2013), nous pouvons dégager quelques indicateurs à suivre, en plus de suivre le cours de la guerre en Syrie :

  • L'état de tension, du désaccord à la scission au sein des groupes d'Al-Qaida opérant en Syrie et entre toutes les factions salafistes-djihadistes.
  • L'évolution de la situation en Irak, notamment d'Al-Qa'ida.
  • Le degré d'acceptation de la charia stricte au sein de la population syrienne, ainsi qu'au sein de la population sunnite régionale et mondiale.
  • L'existence d'alternatives viables, tant sur le plan matériel que spirituel, pour la population, y compris la persistance de l'espoir : si aucun autre modèle n'est fourni en dehors d'un État islamique d'Al Sham et d'un califat, si les gens sont désespérés, ils pourraient bien trouver progressivement un nouveau sens et une nouvelle survie dans un Al Sham islamique (lire à ce sujet le début de l'article de Reza Pankhurst (22 août 2011).
  • La capacité des groupes salafi-jihadistes, d'abord en tant que belligérants puis en tant que dirigeants gagnants, à exercer un contrôle et une coercition durables sur le plan intérieur, d'une part, et à coopter et persuader, d'autre part.

Scénario 3.2....

à suivre

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* Outre une véritable victoire pour l'un des belligérants, Edward Luttwak, dans son article "Donner une chance à la guerre(Foreign Affairs ; Jul/Aug 1999 ; 78, 4) voit une deuxième possibilité qui pourrait conduire à une paix véritable : l'épuisement de tous les belligérants. Je ne prendrai pas en compte ici cette hypothèse car dans un avenir à court ou moyen terme, il semble encore moins probable que cela se produise que le scénario 3, compte tenu des multiples implications externes existantes.

Bibliographie détaillée et sources primaires à venir.

The Red (team) Analysis Weekly n°101, 23 mai 2013

Incertitudes: Quelles alliances et quels partenariats tiendront, lesquels échoueront, lesquels émergeront, pour combien de temps ? La conférence de paix syrienne aura-t-elle lieu et sera-t-elle un succès, à quel coût et avec quel impact géostratégique ? La crise européenne est-elle terminée ou pas du tout ? Les Européens continueront-ils à résister à la pression, et pour combien de temps, et quelle sera la prochaine étape ? La gigantesque expérience monétaire entreprise par le Japon sera-t-elle mortelle ou était-ce la bonne décision ? Et si la crise financière et économique mondiale n'était pas du tout terminée ? Le changement climatique augmente-t-il la probabilité de méga-tornades ou non ? Comment le monde fera-t-il face aux diverses pressions environnementales et aux conséquences involontaires des remèdes mis en avant ? Ces incertitudes croissantes et généralisées pourraient montrer que nous sommes désormais sur une voie pleine de changements systémiques multiples, avec plus de dangers et de menaces, mais aussi avec plus d'espace pour la liberté humaine, si nous sommes assez sages pour prendre la mesure des défis à venir.

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Scénarios pour la Syrie 2 : Pas de Syrien à Genève

Justification et explication du scénario

Les pourparlers diplomatiques échouent et la conférence internationale de Genève n'a pas lieu ou n'est qu'un simulacre pour sauver la face (cf. "Scénario 1 : la paix à Genève ?" et ses sous-scénarios pour ce qui pourrait résulter d'une véritable conférence internationale).

Genève, conférence, conférence de paix sur la Syrie

Compte tenu des forces actuelles sur le terrain et de leur équilibre, nous serions confrontés à un conflit qui s'allongerait (probablement sur des années plutôt que sur des mois) avec des perspectives croissantes d'implication et de chaos au niveau régional et mondial. L'ampleur et la profondeur des débordements régionaux et mondiaux augmenteraient avec la durée de la guerre civile syrienne et, à leur tour, l'alimenteraient.

Le débordement et la contagion prendraient très probablement quatre formes (non mutuellement exclusives). Premièrement, nous serions confrontés à toute action allant d'opérations secrètes à des actions assimilables à des guerres, en passant par des guerres entre États (toutes s'intensifiant probablement vers des guerres). Cet aspect, dans ses formes moins intenses, est en fait déjà à l'œuvre, bien que les États impliqués soient très prudents pour ne pas franchir la ligne (en termes de déclaration et de langage officiels) qui les forcerait à entrer en guerre, comme le montrent, par exemple, les deux raids israéliens sur la Syrie et la manière dont ils sont rapportés (entre autres, voir l Les États-Unis s'excusent d'avoir confirmé les frappes israéliennes - Jerusalem Post 19 mai 2013) . La partie politique de ce débordement est continuellement mise en œuvre, rappelant le célèbre "La guerre n'est que la continuation de la politique par d'autres moyens.." Deuxièmement, nous serions confrontés à un éventail similaire d'actions, mais entre les États et les acteurs surnommés " acteurs non étatiques ", qui se disputent pourtant le pouvoir de l'État.) Ces deux formes de contagion sont généralement imaginées ou attendues comme se produisant au Moyen-Orient, récemment élargi au Moyen-Orient et à l'Afrique du Nord (MENA). Cette vision est toutefois trop étroite, comme nous l'a rappelé la Russie le 17 mai 2013 lorsqu'elle a envoyé "au moins 12 navires de guerre pour patrouiller dans les eaux proches de sa base navale de Tartous, en Syrie." (Times of Israel, 17 mai 2013) pour souligner l'importance de son intérêt pour la Syrie et la région, comme l'a souligné, par exemple, Eldar (AlMonitor, 19 mai 2013). Le débat américain sur le type, la valeur et la sagesse d'une implication américaine en Syrie est un autre exemple évident de la manière dont le conflit syrien déborde de la région.

Troisièmement, les pays accueillant des réfugiés syriens (1,52 million de personnes le 20 mai 2013 -. HCR - voir carte détaillée ci-dessous) seront confrontés à un risque de déstabilisation lié à l'afflux massif de personnes dans des pays qui n'y étaient pas préparés et qui étaient déjà parfois confrontés à des situations difficiles. De plus, les réfugiés peuvent être liés à des unités combattantes et exercer des activités liées à la guerre syrienne dans le pays d'accueil, augmentant ainsi le risque de voir ces pays entraînés dans le conflit. Ces facteurs et les tensions qui en résultent sont déjà à l'œuvre, notamment au Liban (par ex. Euronews 18 mai 2013), la Jordanie (par exemple C. Phillips, Le monde d'aujourd'hui, volume 68, numéro 8/9), la Turquie (par exemple Ibid.., Krohn, The Atlantic, 17 mai 2013).

Réfugiés syriens, guerre civile syrienne

Une quatrième forme de contagion, plus non conventionnelle, doit également être envisagée. Au fur et à mesure que la crise s'étend en Europe, les individus européens attirés par le salafi-jihadi se rendraient de plus en plus en Syrie et en reviendraient (voir Insight du CIRSavril 2013), ce qui accroît non seulement la menace directe du terrorisme en Europe (Europol TE-SAT 2013: 7, 20, 24) et éventuellement aux États-Unis et au Canada mais aussi la propagation des cellules salafi-jihadi. Compte tenu de la crise et des politiques "fragilisantes" d'austérité et d'"externalisation" - c'est-à-dire de privatisation de l'État - (notamment celles qui concernent le monopole légitime de la violence), les actions des cellules salafi-jihadi pourraient accroître le risque de polarisation, par exemple en favorisant davantage la montée et le renforcement de mouvements d'extrême droite déjà en expansion. Les troubles liés à la crise pourraient constituer un environnement favorable aux actions violentes des cellules salafi-jihadi, qui alimenteraient ensuite une agitation politique plus généralisée. La propagation de l'idéologie salafi-jihadi dans des pays frappés non seulement par la crise mais aussi par le manque d'espoir et de vision ainsi que par le déni - quelles que soient les difficultés et les dangers auxquels sont confrontés les citoyens - n'est pas à écarter. Dans cette optique, la vision novatrice promue par le nouveau pape François 1er, qui met en garde contre "le culte de l'argent et la dictature d'une économie sans visage et sans but véritablement humain" (Squires, The Telegraph, 16 mai 2013) pourrait être considéré comme un contrepoids potentiel.

Des risques accrus similaires existeraient pour tout pays dont des ressortissants ont trouvé le moyen de combattre en Syrie, comme par exemple la Tunisie (Sgrena, IPS, 6 avril 2013), et augmentent avec la fragilité de la situation politique intérieure.

Jusqu'à ce qu'une paix réelle s'installe en Syrie (et ceci est donc vrai aussi pour les scénarios 1.1.2. et 1.2.2., cf. poste précédent), il sera plus que nécessaire d'utiliser tous les moyens de renseignement anticipé ou de prévision stratégique et d'alerte, les instruments de politique étrangère et, en dernier ressort, l'intervention militaire (qui peut également être considérée comme un débordement de facto du conflit), pour tenter d'empêcher un nouveau débordement de la guerre civile syrienne, à supposer que cela soit encore possible.

Dans scénarios 1 et 2, l'efficacité du soutien apporté à la Coalition nationale des forces révolutionnaires et d'opposition syriennes devra faire l'objet d'un suivi attentif et l'aide - létale et non létale, officielle et secrète - devra être orientée en fonction des résultats et des conséquences potentielles. Sur scénario 1, cette aide spécifique, ainsi que tout le soutien (voir état des lieux, partie I, II, III) accordée à des parties spécifiques devrait disparaître dès qu'un accord de paix est signé. Dans le scénario 2, toute l'aide devra être contrôlée dans le cadre des types d'implication choisis par les différents acteurs internationaux.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 2

Qu'est-ce qui pourrait augmenter la probabilité qu'un tel scénario se produise ? Les événements qui se déroulent actuellement dans la région MENA - et au-delà - ainsi que sur le champ de bataille syrien doivent également être lus en tenant compte de cette dimension. Les spoilers potentiels ci-dessous doivent être considérés comme liés les uns aux autres et s'alimentant mutuellement la plupart du temps.

  • Il est finalement impossible de trouver une solution qui serait acceptable pour tous les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU.
  • Des acteurs internationaux cruciaux cherchent à tirer trop d'avantages d'autres nations - liées ou non à la région - et les pourparlers diplomatiques échouent.
  • Les événements entourant le dossier syrien, que ce soit sur le champ de bataille ou au niveau international, finissent par faire dérailler les discussions diplomatiques en provoquant le retrait de trop d'acteurs internationaux importants (en raison de leur implication avec et en Syrie ou de leur pouvoir). Par exemple, l'adoption par l'Assemblée générale de l'ONU, le 15 mai 2013, de la déclaration de l'Union européenne. Texte "condamnant la violence en Syrie, exigeant que toutes les parties mettent fin aux hostilités". a été jugé à la fois par Chine et Russie comme peu utile, mais il peut aussi être lu, comme le souligne Nashashibi (AlArabyia, 20 mai 2013) comme un effort pour souligner l'importance d'une solution pacifique au conflit, d'"interlocuteurs représentatifs efficaces pour une transition politique", et donc de la nécessité d'une conférence internationale. Il est également possible que l'attaque terroriste dans la ville turque de Reyhanli fasse partie d'un effort visant à faire dérailler les pourparlers diplomatiques (par ex. Seibert, DW, 14 mai 2013).
  • Il est impossible d'amener le régime de Bachar el-Assad à la table des négociations. De même, s'il était impossible de trouver une personne pour représenter le régime de Bachar al-Assad qui soit acceptable pour toutes les parties, alors la conférence internationale ne pourrait pas avoir lieu, ou, si elle avait lieu, elle ne serait probablement qu'un simulacre, c'est-à-dire que toutes les parties ne seraient pas représentées ou que ceux qui accepteraient de s'asseoir à la table des négociations ne seraient pas représentatifs de ce qui se passe sur le terrain.
  • Une surprise majeure survient qui changerait la perspective internationale sur la Syrie et la guerre. Les discussions diplomatiques pourraient être interrompues.

Évolutions pour le scénario 2

Le scénario 2 devrait conduire soit au scénario 1, soit au scénario 3 (A real Victory in Syria, à paraître). Le principal défi auquel nous sommes confrontés ici, en tant qu'analystes, est de déterminer quand l'un ou l'autre deviendra probable ou plus probable. Le calendrier dépendra de ce qui se passe sous le brouillard de la guerre, sachant que plus le brouillard est épais, plus la possibilité de surprise est élevée. Nous devrons donc surveiller en permanence la situation de guerre et, en conséquence, revoir - et améliorer - tous les scénarios possibles. Par exemple, un éventuel éclatement de la Syrie devrait alors également être inclus comme sous-scénario (pour le scénario 1 et le scénario 3).

Le scénario 2 pourrait aussi, théoriquement, conduire au scénario 4, à savoir l'invasion et l'annexion de la Syrie par une puissance extérieure. Toutefois, compte tenu des normes et des paramètres internationaux actuels, un tel scénario est très improbable et peut être mis de côté. Si ces normes devaient changer, ou si les tensions et les crises internationales actuelles devaient provoquer de graves bouleversements, alors la probabilité du scénario 4 devrait être revue et le scénario développé. Nous pouvons noter un effet secondaire involontaire découlant de l'interdiction internationale de la guerre de conquête. Si elle a grandement amélioré la paix et la stabilité, elle tend également à supprimer une incitation pour les acteurs nationaux à mettre fin à la guerre civile : les factions en guerre ne risquent pas de voir un acteur extérieur utiliser la fragilité engendrée par la guerre civile pour annexer leur territoire, elles peuvent donc continuer à se battre.

Scénario 3 : une véritable victoire en Syrie

A suivre….

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Bibliographie détaillée et sources primaires à venir.

The Red (team) Analysis Weekly n°100, 16 mai 2013

Redessiner la carte stratégique et géopolitique mondiale: De la guerre civile syrienne et de son impact sur la région et au-delà, avec ses nombreuses incertitudes, ses alliances mouvantes et ses dilemmes, à la tension constante entre la Chine et le Japon sur les îles Diaoyu/Senkaku, en passant par la ruée vers l'Arctique, sans oublier le bourbier européen et sa polarisation aux multiples facettes qui semble se déplacer lentement, c'est en fait la carte politique et stratégique mondiale qui est en train d'être redessinée. Son aspect est toujours enveloppé dans le brouillard de la guerre ... ou plutôt des guerres, des crises et des batailles, présentes et, malheureusement, à venir.

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sécurité nationale, risque politique, analyse d'horizon, géopolitique, renseignement d'anticipation

Scénarios pour la Syrie - 1 : La paix à Genève ?

(Mis à jour le 22 mai 2013) Maintenant que nous connaissons et comprenons mieux les acteurs présents sur le champ de bataille syrien, nous pouvons commencer à esquisser des scénarios concernant d'abord les futurs plausibles pour la Syrie et les perspectives de paix à court et moyen terme, et ensuite les implications régionales de ces scénarios, car les dimensions géostratégiques régionales et même mondiales de la guerre en Syrie se précisent chaque jour davantage.

Scénario 1 : Négocier la paix pour la Syrie à Genève

Syrie, guerre civile syrienne, négociations avec la Syrie

Les pourparlers diplomatiques visant à promouvoir un règlement négocié de la guerre civile en Syrie sont couronnés de succès et les négociations commencent.

Sous-scénario 1.1.. : Tous sauf les djihadistes

Les acteurs réunis autour de la table sont le CN et le Conseil suprême de commandement militaire interarmées (CSM), l' le régime de Bashar al-Assad représentée par une personne qui sauverait la face du régime et qui serait acceptable pour toutes les autres parties (en supposant qu'une telle personne existe), la Conseil suprême kurde (SKC) et le Groupes salafi-nationalistes.

Sous-scénario 1.1.1.. : Une paix extérieure syrienne fragile

Une paix extérieure peut être négociée. Nous aurions une paix très fragile incluant tous les acteurs, à l'exception de ceux qui luttent pour un djihad mondial. Compte tenu du niveau actuel d'escalade et des intentions des factions les plus extrémistes, si nous voulons augmenter la probabilité de voir perdurer une véritable paix positive - correspondant à la vision déclarée de la politique étrangère de nombreux pays occidentaux, faisant respecter l'État de droit et les droits de l'homme - nous devons nous assurer que les éléments suivants sont inclus : une présence et un soutien forts de la communauté internationale (malgré le défi du déficit public mentionné ci-dessus), un plan stratégique correctement conçu et des actions réelles plutôt que des promesses irréalistes qui sont intrinsèquement une escalade alors que ce qui doit être arrêté est aussi la politique efficace de "guerre du peuple" des factions extrémistes.

Le choix du moment sera également essentiel une fois la paix négociée, car la rapidité et l'efficacité réelle sont cruciales. Notamment, et compte tenu de la sensibilité exacerbée d'un peuple ayant traversé une guerre civile, ainsi que de l'environnement religieux, la corruption et les divers dysfonctionnements au sein du système d'intervention pour la consolidation de la paix devraient être évités.

Il serait donc crucial de commencer à travailler à un plan approprié de construction de la paix dès que possible, en utilisant tous les canaux de coopération bilatérale et multilatérale. Pour s'assurer que le processus de construction de la paix est correctement mis en œuvre, des systèmes d'alerte précoce et de suivi exploitables doivent être planifiés et construits dès le départ.

Les cinq à dix prochaines années resteront une période très délicate avec des risques accrus de ré-escalade vers la guerre.

Sous-scénario 1.1.2 : Retour à la guerre civile - avantage des djihadistes ?

Les négociations échouent et la Syrie retombe dans la guerre civile, mais dans des conditions différentes : l'échec aura un prix pour chaque acteur impliqué, en fonction des raisons et des conditions qui l'entourent. Les groupes jihadistes mondiaux seraient probablement ceux qui en profiteraient le plus.

Sous-scénario 1.2. : Tous sauf les salafis

Les acteurs réunis autour de la table sont le NC et le SMC, le régime de Bashar al-Assad représenté par une personne qui sauve la face pour le régime et une personne qui serait acceptable pour toutes les autres parties (en supposant qu'une telle personne existe) et le SKC.

Les groupes salafi-nationalistes (tous ou la plupart), même ceux ayant des liens avec le SMC, refuseraient de participer aux négociations.

Sous-scénario 1.2.1.. : Une paix extérieure improbable et très fragile

Les négociations aboutissent. La paix extérieure qui est négociée est encore plus fragile. Les perspectives de réussite de sa mise en œuvre sont fortement réduites. Tous les risques déjà présents dans le sous-scénario précédent (1.1.1) seraient accrus. Avec un niveau de puissance (ressources, troupes et actions) constant par rapport au sous-scénario 1.1.1., la probabilité de succès serait inversement proportionnelle à la politique et aux actions des groupes salafi-nationalistes, allant du simple refus de participer aux négociations et au règlement à leur dénonciation et leur combat actifs. Pour augmenter les chances de succès, le niveau de pouvoir appliqué devrait être proportionnellement accru et la durée pendant laquelle ce pouvoir serait nécessaire devrait être augmentée. En d'autres termes, il faudrait consacrer à la Syrie davantage de troupes et de personnel civil, ainsi que davantage de ressources, et ce plus longtemps.

Sous-scénario 1.2.2. : Retour à la guerre civile - l'avantage des Salafis ?

Les négociations échouent et la Syrie est à nouveau entraînée dans la guerre civile.

Scénario similaire au 1.1.2 mais avec un très fort avantage pour les groupes salafistes, qu'ils soient nationalistes ou jihadistes.

Estimation de la vraisemblance pour le scénario 1

Qu'est-ce qui pourrait augmenter la probabilité qu'un tel scénario se produise ? Quels sont les faits justificatifs qui augmentent la plausibilité du scénario 1 ?

  • La guerre civile en Syrie se prolonge, avec une évolution et une dynamique spécifiques au cours de l'hiver 2012/2013 favorisant les pourparlers diplomatiques entre les puissances internationales (voir la fin de l'article 2.1.1. dernier poste);
  • La crainte des acteurs extérieurs de voir se poursuivre l'utilisation et la propagation des armes chimiques,
  • Une crainte accrue des acteurs extérieurs de voir le conflit syrien s'étendre, ce qui ne pouvait manquer de se produire compte tenu de sa dimension régionale et mondiale, soutenue notamment par la Le lien avec Al Qaeda Déclarations d'avrilpar les déclarations de Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah libanais, reconnaissant que son groupe combat aux côtés du régime de Bashar al-Assad (Black et Roberts, The Guardian, 30 avril 2013.), par les attaques israéliennes des 3 et 5 mai sur la Syrie (voir l'analyse intéressante de Ben Caspit, 5 mai 2013, AlMonitor), puis par l'attaque terroriste du 11 mai 2013 dans la ville turque de Reyhanli, (Daloglu, 12 mai 2013 AlMonitor), ce dernier point étant également lié à la question des réfugiés et à sa dimension déstabilisante pour les pays voisins.
  • La difficulté de mettre en œuvre rapidement, efficacement et avec une forte probabilité de succès toute autre solution. Absence de soutien clair dans les circonscriptions nationales des pays susceptibles d'intervenir, notamment aux États-Unis, en faveur de ces solutions, et possible polarisation des opinions, compte tenu des multiples diasporas et de la catastrophe humanitaire.
  • Coût de l'intervention pour les pays intervenants, compte tenu du problème généralisé des déficits publics et des solutions habituellement choisies pour faire face à ce défi (réduction des dépenses publiques et privatisation de l'État).
  • Conduisant à l'annonce par le ministre des Affaires étrangères Sergei Lavrov et le secrétaire d'État John Kerry que la Russie et les États-Unis avaient convenu "d'œuvrer à la convocation d'une conférence internationale pour trouver une solution politique au conflit en Syrie", et donc à la poursuite des travaux diplomatiques dans cette direction (BBC, 7 mai 2013), ainsi qu'aux échanges diplomatiques en cours entre les parties concernées.
  • Augmentation de la violence et multiplication des attaques - à un point - serait pas être une indication que les pourparlers vont finalement échouer, ni que les négociations de paix sont en train de s'effondrer, car les acteurs chercheront la position de négociation la plus forte possible à la table des négociations et cette position est obtenue par les combats. Les batailles renouvelées doivent être considérées comme une partie (dramatique) du processus global de négociation.
  • Quels acteurs syriens doivent participer ? Compte tenu de la diversité des acteurs sur le terrain, ce point est particulièrement délicat, crucial et donnera très probablement lieu à de nombreuses discussions, déclarations, marchandages et rebondissements, comme le laissent présager les deux déclarations ci-dessous.
    • Moaz Al-Khatib, ancien président de la Coalition nationale pour les forces révolutionnaires et d'opposition syriennes (NC) a suggéré : "Nous refusons toute pensée radicale mais cela ne signifie pas que nous pouvons les exclure, ils sont Syriens et ils ont le droit de s'exprimer, et nous devons entamer un dialogue avec eux. Ils sont Syriens et pour moi un Syrien vaut plus que le monde entier" (Phil Sands, The National, 9 mai 2013). Il est très probable qu'une participation officielle des groupes salafistes-djihadistes sera rejetée par les puissances internationales ainsi que par une partie des factions du CN, mais un dialogue secret pourrait avoir lieu entre certains acteurs syriens. La question pourrait également être posée pour les groupes salafi-nationalistes.
    • La déclaration surprenante d'"Abdul Qader Saleh, commandant de la Brigade Al-Tawhid", membre de la Front de libération de la Syrie à "l'agence de presse turque Cihan" accusant Israël d'avoir détruit des armes qui étaient sur le point d'être saisies par "la rébellion" et non des armes qui étaient sur le point de parvenir au Hezbollah, se rangeant ainsi du côté de l'Iran et du Hezbollah pour soutenir Assad (Ynet, 13 mai 2013) pourrait signaler un durcissement précoce du FSL (qui avait été suggéré comme possible par Lund, 2013 : 27). Cette déclaration pourrait à son tour préparer le terrain pour refuser les négociations potentielles ou pour construire une position de négociation plus forte.

Scénario 2 : pas de Syrien à Genève

Les discussions diplomatiques échouent... à poursuivre.

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Bibliographie détaillée et sources primaires à venir.

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